Paru fin 2011, La France sans ses usines n’est pas un exposé classique sur les méfaits de la désindustrialisation. Patrick Artus et Marie-Paule Virard, ses auteurs, y exposent ce qui leur apparaît comme une nécessité macro-économique : réindustrialiser la France. A partir du constat du phénomène de désindustrialisation, les auteurs suivent un cheminement didactique, expliquant les causes et conséquences du phénomène pour finalement proposer des solutions originales.
Patrick Artus et Marie-Paule Virard délivrent un essai riche en donnée chiffrée et des analyses solides. Par une approche comparée entre la situation française et celle de ses voisins européens, les auteurs mettent en avant une tendance à la destruction d’emplois industriels plus importants en France que dans le reste de l’Europe. De 1999 à 2008, la part de l’emploi industriel a ainsi baissé de 20% contre une moyenne de 14% pour l’ensemble des pays de l’Union Européenne. Ces destructions d’emploi touchent tous les secteurs industriels : exception faite du secteur pharmaceutique et parapharmaceutique qui affiche 1% de création d’emploi sur la période 2000-2008, la tendance est à la baisse et le phénomène naturellement amplifiée sous les effets de la crise de 2008.
Par ailleurs, ces destructions d’emplois contribuent aux pertes de marchés da la France sur un marché mondiale ou elle est déjà distancée : « Entre 1995 et 2012, la France a abandonnée 35% de ses parts de marché » remarquent les auteurs « désormais déficitaire dans l’automobile […], défiée dans l’agroalimentaire, l’industrie française est bousculée aussi sur ses « niches » historiques : nucléaires, trains rapides, avions sont de plus en plus produits en zone dollar ou dans les pays émergents qui exigent, pour prix de leurs mirifiques commandes, des transferts de technologie de plus en plus importants ».
Parmi les causes que retiennent les auteurs, les auteurs abordent en premier lieu le coût du travail. Ils remarquent notamment que si les coûts salariaux unitaires ont augmenté légèrement plus en France qu’en Allemagne, cela ne suffit pas à expliquer les destructions d’emploi massive sur le territoire français. Pour Patrick Artus et Marie-Paule Virard, l’atout de l’Allemagne réside en sa capacité à tirer profit des bas coûts de productions des pays d’Europe de l’Est. En effet, en réalisant à moindre coût la montée en gamme de son offre au moyen du travail qualifié et peu onéreux proposé en Europe de l’Est, l’Allemagne a su depuis 2002 préserver ses marges à l’exportation malgré un euro fort.
Comparativement, la France semble avoir pris le mauvais pari. Son offre trop peu compétitive qualitativement d’une part et son déficit d’innovation d’autre part ne lui ouvre pas les perspectives qui lui permettraient de dépasser la contrainte d’un euro fort. Plus fondamentalement, c’est véritablement le modèle d’innovation de la France que les Patrick Artus et Marie-Paule Virard remettent en question : investissements trop ciblés, insuffisant pour déboucher sur des innovations de rupture, la France subit les conséquences d’un moindre investissement dans l’éducation supérieur.
Les auteurs détaillent d’autres causes pour expliquer la mauvaise santé du tissu industriel français. La pression fiscale sur les entreprises se fait plus lourde en France qu’ailleurs en Europe. Les mentalités ne sont plus aussi enclines à la prise de risque pour innover. La zone euro a joué le rôle de catalyseur, poussant les économies nationales à se spécialiser au lieu de s’homogénéiser et favorisant ainsi la désindustrialisation de la France et sa transformation en économie de service.
La conséquence première de la désindustrialisation de la France concerne d’abord l’emploi. La désindustrialisation et le ralentissement du rythme d’innovation qu’elle suppose empêche en France au secteur des nouvelles technologies et services à haute valeur ajoutée qui lui sont associés d’émerger. Cela explique que la demande d’emploi en France pour ce type de fonction soit encore peu importante.
Par ailleurs, l’industrie est le secteur qui génère traditionnellement le plus de gains de productivité. Voyant son poids diminuer dans l’ensemble de l’activité économique nationale, la croissance s’en trouve donc drastiquement réduite.
Que faire alors pour remettre les usines en marche, récréer de l’emploi, relancer des activités à haut gain de productivité et accélérer la création de vitesse ? Les auteurs écartent tout d’abord l’option protectionniste. Celle-ci, expliquent-ils, ne peut fonctionner que les produits domestiques et étrangers étaient fortement substituables. Or ce n’est pas cas aujourd’hui, la segmentation et la complémentarité de la répartition internationale du travail étant telles que de quelconques mesures protectionnistes seraient impossibles à concevoir.
Pour Patrick Artus et Marie-Paule Virard, l’avenir de l’industrie française est incarné par les PME innovantes. S’inscrivant à contre-courant des politiques actuelles, les auteurs préconisent en effet de privilégier la collecte des cotisations sociales de solidarité par le biais d’un impôt touchant tous les revenus plutôt que celui des entreprises. En plus de cette mesure visant à alléger la pression fiscale exercée sur les PME, les auteurs appellent de leurs vœux une politique publique d’accompagnement de développement des PME innovantes. Il est nécessaire selon eux de favoriser une plus grande coopération entre les PME et leurs partenaires, qu’ils soient étatiques ou privé, locaux ou internationaux.
À travers une analyse originale solidement étayée, Patrick Artus et Marie-Paule Virard dresse dans La France sans ses usines un tableau global de la situation macro-économique française. À l’encontre des idées reçues, les deux auteurs ne présentent pas l’industrie comme le passé de la France. Bien au contraire d’après eux, la capacité relancer croissance du pays semble en grande partie dépendre de la relance de son industrie. Concept peu abordé, Patrick Artus et Marie-Paule Virard présentent ici la réindustrialisation et leur essai comme l’occasion d’envisager avec sérieux un avenir pour la France dont on parle peu.
La France sans ses usines, par Patrick Artus et Marie-Paule Virard, Fayard, 2011, 175 p.
Patrick Artus et Marie-Paule Virard délivrent un essai riche en donnée chiffrée et des analyses solides. Par une approche comparée entre la situation française et celle de ses voisins européens, les auteurs mettent en avant une tendance à la destruction d’emplois industriels plus importants en France que dans le reste de l’Europe. De 1999 à 2008, la part de l’emploi industriel a ainsi baissé de 20% contre une moyenne de 14% pour l’ensemble des pays de l’Union Européenne. Ces destructions d’emploi touchent tous les secteurs industriels : exception faite du secteur pharmaceutique et parapharmaceutique qui affiche 1% de création d’emploi sur la période 2000-2008, la tendance est à la baisse et le phénomène naturellement amplifiée sous les effets de la crise de 2008.
Par ailleurs, ces destructions d’emplois contribuent aux pertes de marchés da la France sur un marché mondiale ou elle est déjà distancée : « Entre 1995 et 2012, la France a abandonnée 35% de ses parts de marché » remarquent les auteurs « désormais déficitaire dans l’automobile […], défiée dans l’agroalimentaire, l’industrie française est bousculée aussi sur ses « niches » historiques : nucléaires, trains rapides, avions sont de plus en plus produits en zone dollar ou dans les pays émergents qui exigent, pour prix de leurs mirifiques commandes, des transferts de technologie de plus en plus importants ».
Parmi les causes que retiennent les auteurs, les auteurs abordent en premier lieu le coût du travail. Ils remarquent notamment que si les coûts salariaux unitaires ont augmenté légèrement plus en France qu’en Allemagne, cela ne suffit pas à expliquer les destructions d’emploi massive sur le territoire français. Pour Patrick Artus et Marie-Paule Virard, l’atout de l’Allemagne réside en sa capacité à tirer profit des bas coûts de productions des pays d’Europe de l’Est. En effet, en réalisant à moindre coût la montée en gamme de son offre au moyen du travail qualifié et peu onéreux proposé en Europe de l’Est, l’Allemagne a su depuis 2002 préserver ses marges à l’exportation malgré un euro fort.
Comparativement, la France semble avoir pris le mauvais pari. Son offre trop peu compétitive qualitativement d’une part et son déficit d’innovation d’autre part ne lui ouvre pas les perspectives qui lui permettraient de dépasser la contrainte d’un euro fort. Plus fondamentalement, c’est véritablement le modèle d’innovation de la France que les Patrick Artus et Marie-Paule Virard remettent en question : investissements trop ciblés, insuffisant pour déboucher sur des innovations de rupture, la France subit les conséquences d’un moindre investissement dans l’éducation supérieur.
Les auteurs détaillent d’autres causes pour expliquer la mauvaise santé du tissu industriel français. La pression fiscale sur les entreprises se fait plus lourde en France qu’ailleurs en Europe. Les mentalités ne sont plus aussi enclines à la prise de risque pour innover. La zone euro a joué le rôle de catalyseur, poussant les économies nationales à se spécialiser au lieu de s’homogénéiser et favorisant ainsi la désindustrialisation de la France et sa transformation en économie de service.
La conséquence première de la désindustrialisation de la France concerne d’abord l’emploi. La désindustrialisation et le ralentissement du rythme d’innovation qu’elle suppose empêche en France au secteur des nouvelles technologies et services à haute valeur ajoutée qui lui sont associés d’émerger. Cela explique que la demande d’emploi en France pour ce type de fonction soit encore peu importante.
Par ailleurs, l’industrie est le secteur qui génère traditionnellement le plus de gains de productivité. Voyant son poids diminuer dans l’ensemble de l’activité économique nationale, la croissance s’en trouve donc drastiquement réduite.
Que faire alors pour remettre les usines en marche, récréer de l’emploi, relancer des activités à haut gain de productivité et accélérer la création de vitesse ? Les auteurs écartent tout d’abord l’option protectionniste. Celle-ci, expliquent-ils, ne peut fonctionner que les produits domestiques et étrangers étaient fortement substituables. Or ce n’est pas cas aujourd’hui, la segmentation et la complémentarité de la répartition internationale du travail étant telles que de quelconques mesures protectionnistes seraient impossibles à concevoir.
Pour Patrick Artus et Marie-Paule Virard, l’avenir de l’industrie française est incarné par les PME innovantes. S’inscrivant à contre-courant des politiques actuelles, les auteurs préconisent en effet de privilégier la collecte des cotisations sociales de solidarité par le biais d’un impôt touchant tous les revenus plutôt que celui des entreprises. En plus de cette mesure visant à alléger la pression fiscale exercée sur les PME, les auteurs appellent de leurs vœux une politique publique d’accompagnement de développement des PME innovantes. Il est nécessaire selon eux de favoriser une plus grande coopération entre les PME et leurs partenaires, qu’ils soient étatiques ou privé, locaux ou internationaux.
À travers une analyse originale solidement étayée, Patrick Artus et Marie-Paule Virard dresse dans La France sans ses usines un tableau global de la situation macro-économique française. À l’encontre des idées reçues, les deux auteurs ne présentent pas l’industrie comme le passé de la France. Bien au contraire d’après eux, la capacité relancer croissance du pays semble en grande partie dépendre de la relance de son industrie. Concept peu abordé, Patrick Artus et Marie-Paule Virard présentent ici la réindustrialisation et leur essai comme l’occasion d’envisager avec sérieux un avenir pour la France dont on parle peu.
La France sans ses usines, par Patrick Artus et Marie-Paule Virard, Fayard, 2011, 175 p.