Au cours des deux premiers chapitres de son ouvrage, François Sarfati s'attache à décrire la perception qu'ont les courtiers en ligne de leur propre métier ainsi qu'à détecter certains écarts avec la réalité de leur travail. Pour cela, le sociologue s'appuie sur les résultats de deux ans d'enquête et menés auprès d'un échantillon de professionnels. Il met ainsi en évidence différentes représentations ancrées dans l'esprit de ces salariés.
Une première est que les courtiers en ligne présentent volontiers leur métier comme une activité intellectuellement stimulante et non pas comme la seule recherche du profit pour le compte d'un intérêt privé. La seconde est que ces courtiers, dont la fonction est d'être l'intermédiaire entre des investisseurs particuliers et les marchés financiers, considèrent leur travail comme similaire à celui des professionnels de la finance s'adressant aux investisseurs professionnels et travaillant pour des institutions financières.
Les conditions de travail des courtiers en ligne, rappelle François Sarfati, sont pourtant plus proches de celle des call-centers que des salles de marchés. Leur niveau d'éducation est aussi plus faible et leur statut plus précaire que celui des financiers auxquels ils semblent s'identifier. Mais il ressort de cette enquête sociologique que les courtiers en ligne ainsi étudiés répondent à une identité hydrique, dont l'auteur précise qu'elle est d'ailleurs intégrée jusque dans la sphère privée où ces professionnels gèrent leur propre portefeuille de la même façon qu'ils le font pour le compte de clients.
Les travailleurs ici étudiés ont donc un profil de passionnés. C'est là un des points forts de l'ouvrage de François Sarfati. Ce dernier explique en effet que la passion au travail peut être objectivement observée au sein de corps de métier marqué par la précarité et la pénibilité. Les salariés étudiés par François Sarfati semblent en effet échapper aux désenchantements et pour l'expliquer, l'auteur invoque différentes raisons. Dans un contexte de grande incertitude économique, il explique ainsi notamment que ces jeunes actifs, qui n'ont connu que la compétition exacerbée sur le marché de l'emploi, considèrent qu'ils ont « du côté des vainqueurs ». Malgré les sacrifices et les contraintes que leur impose leur métier, ces salariés en tirent tout de même une satisfaction qui les rend fiers de leur travail. D'où leur passion.
Avec ces travaux, François Sarfati lève le voile sur de nouveaux mécanismes de valorisation de l'identité professionnelle. Ceux-ci ne sont d'ailleurs pas indépendants de la crise économique larvée qui s'est installée en France et ailleurs dans le monde à l'issue des 30 Glorieuses. Constatant par ailleurs que ces employés, dont beaucoup sont précaires, parviennent à obtenir satisfaction de leur statut à la marge de toute action collective, l'ouvrage de François Sarfati ouvre également la voie à un champ d'études beaucoup plus large : celui des mécanismes contemporains de la solidarité salariale.
(1) SARFATI, F., Du Côté des vainqueurs – Une Sociologie de l'incertitude sur les marchés du travail, Presses Universitaires du Septentrion, Col. Sciences sociales 2012, 195pp..
Une première est que les courtiers en ligne présentent volontiers leur métier comme une activité intellectuellement stimulante et non pas comme la seule recherche du profit pour le compte d'un intérêt privé. La seconde est que ces courtiers, dont la fonction est d'être l'intermédiaire entre des investisseurs particuliers et les marchés financiers, considèrent leur travail comme similaire à celui des professionnels de la finance s'adressant aux investisseurs professionnels et travaillant pour des institutions financières.
Les conditions de travail des courtiers en ligne, rappelle François Sarfati, sont pourtant plus proches de celle des call-centers que des salles de marchés. Leur niveau d'éducation est aussi plus faible et leur statut plus précaire que celui des financiers auxquels ils semblent s'identifier. Mais il ressort de cette enquête sociologique que les courtiers en ligne ainsi étudiés répondent à une identité hydrique, dont l'auteur précise qu'elle est d'ailleurs intégrée jusque dans la sphère privée où ces professionnels gèrent leur propre portefeuille de la même façon qu'ils le font pour le compte de clients.
Les travailleurs ici étudiés ont donc un profil de passionnés. C'est là un des points forts de l'ouvrage de François Sarfati. Ce dernier explique en effet que la passion au travail peut être objectivement observée au sein de corps de métier marqué par la précarité et la pénibilité. Les salariés étudiés par François Sarfati semblent en effet échapper aux désenchantements et pour l'expliquer, l'auteur invoque différentes raisons. Dans un contexte de grande incertitude économique, il explique ainsi notamment que ces jeunes actifs, qui n'ont connu que la compétition exacerbée sur le marché de l'emploi, considèrent qu'ils ont « du côté des vainqueurs ». Malgré les sacrifices et les contraintes que leur impose leur métier, ces salariés en tirent tout de même une satisfaction qui les rend fiers de leur travail. D'où leur passion.
Avec ces travaux, François Sarfati lève le voile sur de nouveaux mécanismes de valorisation de l'identité professionnelle. Ceux-ci ne sont d'ailleurs pas indépendants de la crise économique larvée qui s'est installée en France et ailleurs dans le monde à l'issue des 30 Glorieuses. Constatant par ailleurs que ces employés, dont beaucoup sont précaires, parviennent à obtenir satisfaction de leur statut à la marge de toute action collective, l'ouvrage de François Sarfati ouvre également la voie à un champ d'études beaucoup plus large : celui des mécanismes contemporains de la solidarité salariale.
(1) SARFATI, F., Du Côté des vainqueurs – Une Sociologie de l'incertitude sur les marchés du travail, Presses Universitaires du Septentrion, Col. Sciences sociales 2012, 195pp..