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Le nouveau visage de la FinTech mondiale

Entretien avec Fabrice Odent, KPMG


La Rédaction
Jeudi 17 Mars 2016



FinTech. Le mot est sur toutes les lèvres mais reste assez mystérieux. Quel est ce secteur en plein essor? Qui sont les acteurs majeurs de ce marché? Quel avenir? Nous avons posé ces questions à Fabrice Odent, associé chez KMPG qui a dévoilé il y a quelques semaines le classement 2015 des FinTech. Entretien



Une étude réalisée par KPMG mesure l’évolution de la FinTech sur le plan international. Qu’entend-on concrètement par FinTech ?

commons.wikimedia.org
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Il s’agit de la contraction des termes « finance » et « technologie ». Les nouvelles technologies ne cessent de se développer, révolutionnant le monde des services financiers. Les FinTech, ce sont les technologies mises au service de la finance, que l’on peut classer en deux catégories : les « disruptors » et les « enablers ». Certaines FinTech sont en effet considérées comme disruptives - dans la mesure où elles créent de nouveaux modèles en rupture avec l’existant - tandis que d’autres, des facilitateurs, sont plutôt là pour accompagner les acteurs de la finance.  La frontière n’est d’ailleurs pas - ou plus - complètement étanche, et certaines FinTech disruptives se transforment parfois en FinTech accompagnatrices (l’étude révèle un pourcentage croissant de ce dernier type de FinTech). Les banques sont de plus en plus présentes créant leurs propres FinTech afin de ne pas passer à côté de la profonde mutation du paysage financier qui s’opère aujourd’hui.

Pourriez-vous revenir sur la méthodologie utilisée pour dresser ce classement ?

L’étude s’appuie sur cinq critères de classement : le montant des fonds levés, le taux de levée de fond, la diversité géographique et sectorielle, l’attrait du marché et du consommateur, et pour finir, un facteur plus subjectif, à savoir la capacité d’innovation de l’offre proposée. Par rapport au classement 2014, certains acteurs rentrent et d’autres sortent, traduisant la volatilité inhérente à cette activité.

Quelles sont les grandes tendances dégagées par cette étude?

La première tendance à noter est que le secteur est en très forte expansion. Le financement des FinTech a été multiplié par 7 en 3 ans, avec une augmentation de 66 % sur la période 2014-2015. Ce phénomène s’observe ensuite sur tous les continents. Beaucoup de pays en développement sont propices à l’essor des FinTech, sous l’effet notamment de la combinaison d’un besoin de bancarisation, d’agilité et de financements disponibles. L’étude note également que les services liés aux paiements, devises et transactions représentent 25%  des FinTech. Enfin sept FinTech Assurance émergent dans le classement.

La Chine se place en tête du classement et affiche une nette progression avec 7 entreprises innovantes dans les FinTech en 2015 contre une seule en 2014. Comment peut-on expliquer cette performance ?

Avec 1.3 milliards d’habitants, la Chine connait une forte augmentation de son taux de bancarisation et une utilisation massive du téléphone mobile, ce qui explique en partie le développement du mobile banking en lien avec celui des FinTech. Le numéro 1 du classement est un assureur en ligne, ZhongAn, une entreprise innovante d’assurance de biens en ligne, issue de la joint-venture entre le groupe Alibaba (e-commerce), Tencent Holdings (réseaux sociaux et jeux vidéo) et l’entreprise d’assurance Ping An Insurance. En France comme dans les autres pays européens, le marché des assurances est plus ancien et a sa propre logique de fonctionnement, ce qui rend plus difficile la réalisation d’initiatives du type de celle de ZhongAn.

La France n’affiche qu’un seul leader au classement. Quelles sont les raisons de la faible présence de la FinTech française sur le plan mondial ?

La structure et l’organisation des services financiers en France comme beaucoup d’autres pays développés ont leur propre histoire construite autour de règles et d’acteurs établis. On constate cependant que les banques comme les compagnies d’assurance sont conscientes de l’importance des nouvelles technologies et de la menace potentielle qu’elles représentent. En France, on observe ainsi depuis quelques années la mise en œuvre de « stratégie FinTech » par toutes les banques, soit par des initiatives d’investissement interne, soit par des prises de participation. Les lignes sont en train de bouger, et même vite.

Selon vous, quelles tendances vont émerger sur le marché dans les années à venir ?

Pour bien comprendre le phénomène des FinTech, je pense qu’il faut comprendre que les nouvelles technologies permettent de répondre aux attentes des clients et à un nouveau mode de relation avec les banques. C’est selon moi un point d’entrée clé vers le digital et de nouveaux modes de distribution. Les comportements des clients ont changé : il faut être plus rapide, plus accessible et plus efficace. Les FinTech sont des facilitateurs technologiques qui permettent de répondre à cette nouvelle donne.  La question est de savoir si tout se passera au sein des banques. De nouveaux acteurs vont-ils émerger ? 

Toutes les banques ont aujourd’hui une stratégie en la matière et peu d’acteurs sont passifs.  Pour ceux qui n’auraient pas encore saisi l’enjeu des FinTech, la question de leur survie à terme se pose. On observe déjà d’autres acteurs, les entreprises issues du secteur des télécoms par exemple, qui proposent des solutions mettant le client au cœur de leur stratégie. A terme, le phénomène d’ « open banking » pourrait s’accélérer, dans un environnement bancaire plus ouvert. Les nouvelles technologies bousculent l’ordre établi et chaque acteur doit trouver sa place dans ce nouvel environnement.

Fabrice Odent est associé chez KPMG, en charge des activités Financial Services en France. Fabrice Odent dispose de plus de 30 ans d’expérience en audit et en conseil auprès des banques, en France et à l’international. En complément de ses activités d’audit, Fabrice Odent accompagne les banques dans leur développement, notamment en matière de régulation, d’investissement, de financement et d’optimisation de leur organisation.  


Retrouvez le classement FinTech100 de KPMG ici










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