La presse française : une industrie en déclin ?
Crédit: pixabay
On assiste actuellement à un phénomène de concentration si bien qu’aujourd’hui, on ne parle quasiment plus de presse mais de groupe de presse, englobant à la fois télévision, presse écrite et radio. Les grands groupes financiers ont désormais la main mise sur la société médiatique en France... Ainsi, « LVMH ce n’est pas que le luxe et la finance mais aussi la presse, et ce depuis une trentaine d’années… » (1) Mais si Bernard Arnaud possède désormais le Chasseur Français, La Tribune et les Echos, ce n’est pas le seul grand patron à s’être lancé à la chasse aux médias. C’est « un phénomène bien français de voir, un à un, les journaux tomber dans l’escarcelle de groupes puissants. » (1) Serge Dassault et le Figaro, le trio Niel-Pigasse-Bergé et Le Monde, « aujourd’hui, il n’y a en France quasi plus « d’indépendants », à part le groupe NRJ, ou des titres comme Mediapart et Le Canard enchaîné. » (2) Des rachats qui se multiplient et que certains qualifient même de véritables « soldes ». (3) La presse est ainsi devenue un bien « marchandisable » à l’image du rachat du Parisien par LVMH pour seulement 5 millions d’euros. Comme Vincent Bolloré aux manettes de Canal Plus, Patrick Drahi se retrouve lui aussi à la tête d’un véritable conglomérat, composé notamment de Libération et de l’Express. Entre financiarisation et rachats à « prix cassés », comment la presse en est-elle arrivée là ?
L’apparition d’Internet et des nouvelles technologies de l’information dans le panorama médiatique ont fortement changé la donne. La multitude de contenus disponibles et accessibles en un simple clic a propulsé Internet au rang de média de masse, restructurant profondément les pratiques des lecteurs. L’avènement de l’économie numérique force ainsi les médias, d’une part à s’exporter sur la toile, mais aussi à recourir à de vraies stratégies de marque pour attirer un lecteur de plus en plus volatile. Le « business model » du numérique s’impose donc à la presse, et « pendant que ses ventes en kiosque périclitent ou peinent à se maintenir, elle doit investir sur Internet et le mobile, sans retrouver des recettes publicitaires comparables ni le même type d’abonnés fidèles et payants. » (3) Car l’avènement du numérique est celui du modèle de la gratuité, fournissant de nouveaux espaces d’expression où chacun peut créer et véhiculer instantanément des contenus.Par ailleurs, une nouvelle question se pose s'agissant de l’émergence de « citoyens journalistes » qui remettrait en question le rôle des journalistes professionnels comme relais principal de l’information.
La question se pose logiquement pour une activité censée posséder des normes éthiques et une charte déontologique des plus exigeantes… Certains, comme J.C Texier, Président de Rigier France, considèrent cette financiarisation comme révélatrice du basculement de la presse en une « industrie déclinante » (1). D’autres s’attachent à l’argument de la survie… La survie oui, mais à quel prix ?
L’apparition d’Internet et des nouvelles technologies de l’information dans le panorama médiatique ont fortement changé la donne. La multitude de contenus disponibles et accessibles en un simple clic a propulsé Internet au rang de média de masse, restructurant profondément les pratiques des lecteurs. L’avènement de l’économie numérique force ainsi les médias, d’une part à s’exporter sur la toile, mais aussi à recourir à de vraies stratégies de marque pour attirer un lecteur de plus en plus volatile. Le « business model » du numérique s’impose donc à la presse, et « pendant que ses ventes en kiosque périclitent ou peinent à se maintenir, elle doit investir sur Internet et le mobile, sans retrouver des recettes publicitaires comparables ni le même type d’abonnés fidèles et payants. » (3) Car l’avènement du numérique est celui du modèle de la gratuité, fournissant de nouveaux espaces d’expression où chacun peut créer et véhiculer instantanément des contenus.Par ailleurs, une nouvelle question se pose s'agissant de l’émergence de « citoyens journalistes » qui remettrait en question le rôle des journalistes professionnels comme relais principal de l’information.
La question se pose logiquement pour une activité censée posséder des normes éthiques et une charte déontologique des plus exigeantes… Certains, comme J.C Texier, Président de Rigier France, considèrent cette financiarisation comme révélatrice du basculement de la presse en une « industrie déclinante » (1). D’autres s’attachent à l’argument de la survie… La survie oui, mais à quel prix ?
Le prix de la survie
Quelle marge de manœuvre reste t’il réellement aux rédactions? Claude Baudry, chef de la rubrique médias de l'Humanité, lors d’un débat télévisé le 14 septembre dernier, dénonçait ainsi qu’aujourd’hui dans la presse, « celui qui paye décide » (4). Cette emprise financière sur les médias n’est peut-être pas nouvelle mais son aspect décomplexé pour le coup, l’est. De plus, ces rachats n’ont-ils pour effet que de recapitaliser des sociétés de presse en détresse ? Les polémiques qui gravitent autour de Bolloré ou encore la lettre de la Rédaction de l’Express à Drahi « qui dénonçait la « dégradation » de la qualité de l’hebdomadaire depuis sa prise de contrôle par l’homme d’affaires » (5) interrogent quant à la réelle nature de cette emprise. Ces financiers doivent-ils être vus comme sauveurs ou fossoyeurs de ces journaux ?
Car le pluralisme de l’information est plus qu’une nécessité, c’est un droit fondamental. La raison d’être des médias d’information est de fournir une grille de lecture à travers laquelle le citoyen déchiffre les événements et construit sa représentation du monde. Si la neutralité de l’information ne peut être toujours garantie, chaque rédaction ayant ses sensibilités idéologiques, la possibilité d’avoir accès à des contenus différemment engagés est un impératif.
Evidemment, de nombreux journaux différents continuent d’exister. Cependant, véhiculent-ils toujours des opinions plurielles ? Peut-on encore parler de pluralisme ou doit-on parler de pluralité ? Beaucoup accusent cette emprise des financiers sur la presse comme générant une uniformisation du discours médiatique. Ainsi, la question n’est pas vraiment celle du nombre mais celle du contenu. Car une centaine de chaines d’information qui diffusent la même version des évènements est tout sauf une garantie de pluralisme…
Car le pluralisme de l’information est plus qu’une nécessité, c’est un droit fondamental. La raison d’être des médias d’information est de fournir une grille de lecture à travers laquelle le citoyen déchiffre les événements et construit sa représentation du monde. Si la neutralité de l’information ne peut être toujours garantie, chaque rédaction ayant ses sensibilités idéologiques, la possibilité d’avoir accès à des contenus différemment engagés est un impératif.
Evidemment, de nombreux journaux différents continuent d’exister. Cependant, véhiculent-ils toujours des opinions plurielles ? Peut-on encore parler de pluralisme ou doit-on parler de pluralité ? Beaucoup accusent cette emprise des financiers sur la presse comme générant une uniformisation du discours médiatique. Ainsi, la question n’est pas vraiment celle du nombre mais celle du contenu. Car une centaine de chaines d’information qui diffusent la même version des évènements est tout sauf une garantie de pluralisme…
Le « quatrième pouvoir » ou appareil idéologique de premier choix
Quel est donc le degré d’interventionnisme de ces grands patrons sur le contenu éditorial ? Au mois de Juillet, Mediapart révèle ainsi que « la direction de Canal+ a revendiqué sans ambiguïté mi-septembre (…) la censure par le nouveau propriétaire de la chaîne, Vincent Bolloré, d’un documentaire embarrassant pour le Crédit mutuel… » (6) De quoi relancer la question de l’indépendance de ces rédactions aux mains des financiers… » Le comportement polémique de Bolloré ne cesse de secouer la société médiatique ces derniers temps. Si bien que le 14 Octobre dernier, Fleur Pellerin soutenait un amendement anti-Bolloré au nom de l’indépendance des rédactions. Bien qu’il se soit engagé à mettre en place une charte éthique et à garantir la liberté des rédactions, de nombreux soupçons de censure persistent à son égard… Le patron s’octroierait ainsi un véritable pouvoir de décision sur les contenus diffusés et alors que le doute s’immisce toujours plus quant à son impact sur la rédaction des scénarios des Guignols (7), on pourrait considérer cette promesse d’indépendance financière davantage comme un carcan que comme une libération. Les rédactions doivent désormais jongler entre leur sensibilité éditoriale et la nécessité de ne pas froisser leurs patrons. Les maisons de presse sont-elles en passe de devenir les garantes des intérêts de ces derniers?
Et si l’enjeu n’était pas purement économique mais surtout politique ? Les grands PDG s’offrent de véritables relais d’opinion et d’influence. Faire passer des idées servant des intérêts personnels sous l’apparence d’information, traduit bel et bien l’intérêt de ceux-ci à continuer d’alimenter la confusion des genres. Car le vrai combat aujourd’hui, c’est celui de l’influence…
Dès lors, existent-ils des moyens pour contrer cette dérive ? Si Internet est souvent montré du doigt comme fauteur de trouble et responsable de la mise à mal de la presse écrite, ne peut-on pas voir en ce média malgré tout un espoir ? Offrant de nouveaux espaces d’expression, celui-ci peut-il représenter le futur du pluralisme si ce n’est plus le cas de la presse écrite ? Si bien évidemment beaucoup estiment que sa nature donne à tous le pouvoir de créer du contenu, ce qui peut représenter une aubaine comme une menace, la réponse peut être faite que comme tout outil de cette nature, son usage démocratique dépend de l’utilisation qui en faite…
Et si l’enjeu n’était pas purement économique mais surtout politique ? Les grands PDG s’offrent de véritables relais d’opinion et d’influence. Faire passer des idées servant des intérêts personnels sous l’apparence d’information, traduit bel et bien l’intérêt de ceux-ci à continuer d’alimenter la confusion des genres. Car le vrai combat aujourd’hui, c’est celui de l’influence…
Dès lors, existent-ils des moyens pour contrer cette dérive ? Si Internet est souvent montré du doigt comme fauteur de trouble et responsable de la mise à mal de la presse écrite, ne peut-on pas voir en ce média malgré tout un espoir ? Offrant de nouveaux espaces d’expression, celui-ci peut-il représenter le futur du pluralisme si ce n’est plus le cas de la presse écrite ? Si bien évidemment beaucoup estiment que sa nature donne à tous le pouvoir de créer du contenu, ce qui peut représenter une aubaine comme une menace, la réponse peut être faite que comme tout outil de cette nature, son usage démocratique dépend de l’utilisation qui en faite…
- http://www.la-croix.com/Culture/Medias/Pourquoi-les-journaux-sont-ils-rachetes-par-de-grands-groupes-financiers-2015-05-27-1316599
- http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2015/07/28/drahi-bollore-comment-les-medias-francais-se-recomposent_4702073_3236.html
- http://www.liberation.fr/ecrans/2015/05/29/presse-les-milliardaires-font-les-soldes_1319439
- https://www.youtube.com/watch?v=LN-bTfwzGkk
- http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2015/09/08/les-journalistes-de-l-express-denoncent-la-strategie-suicidaire-de-patrick-drahi_4749354_3236.html
- http://www.mediapart.fr/journal/france/290715/canal-vincent-bollore-censure-un-documentaire-sur-le-credit-mutuel
- http://www.arretsurimages.net/breves/2015-09-18/Comment-Bollore-s-est-improvise-auteur-des-Guignols-Le-Monde-id19264