Consommer sous l'Antiquité
Quelle que soit l’époque, la consommation a toujours été une des activités importantes de l’humanité, qui s’est chaque fois organisée en un système fondé sur l’échange marchand propre à la soutenir, à la stimuler et à la diffuser. Ce système de consommation met en présence deux catégories d’intervenants directs : le producteur et l’acheteur, auxquels peuvent s’ajouter au moins deux autres intervenants directement ou indirectement liés à l’échange : le commerçant, qui sert d’intermédiaire dans la transaction, et le financier, dont le rôle est de prêter aux autres intervenants les sommes requises pour mener à bien toutes les opérations nécessaires à l’échange des marchandises (manufacturer, transporter, stocker, acheter…).
Dans l’Antiquité déjà, les Phéniciens avaient établi un important empire marchand, défendu par une puissante flotte de guerre, sur le pourtour de la Méditerranée (1) ; pour moi, le parallèle avec les empires britannique et américain s’impose comme une évidence, même si plusieurs millénaires séparent cet empire antique de ses homologues modernes. Cet exemple étaye admirablement bien mon affirmation quant à la pérennité d’un système de consommation.
Dans l’Antiquité déjà, les Phéniciens avaient établi un important empire marchand, défendu par une puissante flotte de guerre, sur le pourtour de la Méditerranée (1) ; pour moi, le parallèle avec les empires britannique et américain s’impose comme une évidence, même si plusieurs millénaires séparent cet empire antique de ses homologues modernes. Cet exemple étaye admirablement bien mon affirmation quant à la pérennité d’un système de consommation.
L'avènement du capitalisme
L’évolution moderne du système de consommation s’est faite de concert avec celle du capitalisme, le système économique qui a prévalu au sein de tous les pays économiquement avancés. Certes, le développement technologique, comme la consommation bien évidemment, puisque les deux phénomènes sont étroitement liés, et le capitalisme peuvent exister l’un sans l’autre : « Le capitalisme a existé dans d’autres civilisations dont le développement technique était relativement faible. La technique fit des progrès réguliers du xe au xve siècle sans avoir besoin de l’aiguillon particulier du capitalisme (2). » Cependant, le capitalisme a servi et sert encore d’aiguillon au développement technologique et donc à l’essor de la consommation.
Au capitalisme marchand, dont l’exemple suprême est Venise selon Galbraith (3), correspondait, pour la vaste majorité des gens, une consommation visant à satisfaire uniquement les besoins les plus fondamentaux. La consommation ne pouvait pas s’emballer pour deux raisons. D’une part, exception faite d’une minorité de privilégiés, les gens ne disposaient pas d’un revenu suffisant pour acheter les objets dont ils auraient pu avoir envie. D’autre part, les méthodes de production existantes n’auraient de toute façon pas permis de produire ces objets en quantité suffisante.
C’est la révolution industrielle, entreprise dans la seconde moitié du dix-huitième siècle et qui se poursuit jusque vers la fin du dix-neuvième, qui a permis de remédier au problème de production. À cette époque, la révolution du complexe techno-industriel se caractérise par deux changements fondamentaux : la substitution du bois par le charbon comme source d’énergie et par le fer comme matière première. « Une nouvelle civilisation est née de ce combiné fer-charbon (4)», écrit Mumford. Ce changement se concrétise entre autres dans la machine à vapeur à piston, ancêtre des moteurs qui propulsent nos voitures encore aujourd’hui. C’est cette révolution qui a permis à la consommation de prendre son essor, prenant différentes formes selon l’époque. Dès lors, la table est mise pour l’explosion de consommation que connaîtra le vingtième siècle.
Au capitalisme marchand, dont l’exemple suprême est Venise selon Galbraith (3), correspondait, pour la vaste majorité des gens, une consommation visant à satisfaire uniquement les besoins les plus fondamentaux. La consommation ne pouvait pas s’emballer pour deux raisons. D’une part, exception faite d’une minorité de privilégiés, les gens ne disposaient pas d’un revenu suffisant pour acheter les objets dont ils auraient pu avoir envie. D’autre part, les méthodes de production existantes n’auraient de toute façon pas permis de produire ces objets en quantité suffisante.
C’est la révolution industrielle, entreprise dans la seconde moitié du dix-huitième siècle et qui se poursuit jusque vers la fin du dix-neuvième, qui a permis de remédier au problème de production. À cette époque, la révolution du complexe techno-industriel se caractérise par deux changements fondamentaux : la substitution du bois par le charbon comme source d’énergie et par le fer comme matière première. « Une nouvelle civilisation est née de ce combiné fer-charbon (4)», écrit Mumford. Ce changement se concrétise entre autres dans la machine à vapeur à piston, ancêtre des moteurs qui propulsent nos voitures encore aujourd’hui. C’est cette révolution qui a permis à la consommation de prendre son essor, prenant différentes formes selon l’époque. Dès lors, la table est mise pour l’explosion de consommation que connaîtra le vingtième siècle.
(1) Phoenicia 2012, Encyclopædia Britannica Online
(2) L. Mumford, Technique et civilisation, trad. D. Moutonnier, Paris, Seuil, 1950, p. 235. (Technics and Civilization, New York, Harcourt, Brace & World, 1934.)
(3) K. Galbraith, The Economics of Innocent Fraud, Boston, Houghton Mifflin, 2004, p. 8.
(4) L. Mumford, op. cit., p. 145.
(2) L. Mumford, Technique et civilisation, trad. D. Moutonnier, Paris, Seuil, 1950, p. 235. (Technics and Civilization, New York, Harcourt, Brace & World, 1934.)
(3) K. Galbraith, The Economics of Innocent Fraud, Boston, Houghton Mifflin, 2004, p. 8.
(4) L. Mumford, op. cit., p. 145.
Benoit Duguay est professeur titulaire à l'École des sciences de la gestion de l'UQAM, où il oeuvre depuis 2003, et chercheur à la Chaire de relations publiques et communication marketing. Il a précédemment fait carrière en ventes et marketing, principalement dans l’industrie informatique, au sein de sociétés multinationales et de petites et moyennes entreprises.
Il est notamment l'auteur de Consommation et nouvelles technologies (2009), Consommation et luxe (2007) et Consommation et image de soi (2005). Son dernier ouvrage Consommer, consumer. Dérives de la consommation (2015), paru aux Editions Liber, fait l'historique de la société de consommation et étudie en détail ce que l'auteur dépeint comme la "société de consumation". Au delà de cette analyse, Benoit Duguay nous invite à une réflexion autour de notre société de l'excès.
Il est notamment l'auteur de Consommation et nouvelles technologies (2009), Consommation et luxe (2007) et Consommation et image de soi (2005). Son dernier ouvrage Consommer, consumer. Dérives de la consommation (2015), paru aux Editions Liber, fait l'historique de la société de consommation et étudie en détail ce que l'auteur dépeint comme la "société de consumation". Au delà de cette analyse, Benoit Duguay nous invite à une réflexion autour de notre société de l'excès.